Pourquoi opter pour une 2cv plutôt qu’une voiture électrique ?

Article long mais instructif…

Faut-il louer une voiture électrique qui sort de production aujourd’hui ou une 2cv née au maximum en 1990, avec 100 000km au compteur et pesant moins de 600kg ? Le choix est-il si évident ? Quelques éléments de réflexion…

1) Une 2cv peut être optimisée facilement grâce à la mise en place d’un allumage électronique et au réglage du jeu de soupapes.

Ces actions ont un impact significatif sur l’efficacité énergétique des moteurs et de leurs performances globales avec :

– L’amélioration de l’efficacité de la combustion : l’allumage électronique permet un meilleur contrôle de la synchronisation de l’allumage, assurant une combustion plus précise du mélange air-carburant. Cela peut entraîner une combustion plus complète, une meilleure utilisation du carburant et une augmentation de l’efficacité énergétique du moteur.

– La réduction de la consommation de carburant : en optimisant la combustion, l’allumage électronique peut contribuer à une réduction de la consommation de carburant. Une combustion plus efficace signifie que moins de carburant est gaspillé et une plus grande quantité d’énergie est convertie en puissance motrice, permettant de parcourir une plus grande distance avec la même quantité de carburant.

– L’amélioration des performances : l’allumage électronique peut également améliorer les performances de la 2CV en permettant une meilleure synchronisation de l’allumage avec les autres composants du moteur. Cela peut se traduire par une accélération plus douce, une réponse plus rapide de l’accélération et une augmentation de la puissance.

– La réduction des émissions : une combustion plus efficace grâce à l’allumage électronique peut contribuer à une réduction des émissions polluantes. Cela peut se traduire par une diminution des émissions de gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone (CO₂) et des polluants atmosphériques tels que les oxydes d’azote (NOx).

– L’élimination des minerais rares constituant les vis platinées sujettes à l’usure grâce à leur remplacement par l’allumage électronique réduit aussi l’entretien (pièces et main d’œuvre).

Il convient de noter que la mise en place d’un allumage électronique et le réglage précis du jeu des soupapes ne peuvent être qu’optimum au vu de l’entretien général et de l’état des moteurs de nos 2cv. Ces actions peuvent être considérées comme une mise à niveau bénéfique pour améliorer l’efficacité énergétique et les performances d’un véhicule ancien.

2) Les coût induits de fabrication d’une 2cv et ceux d’une voiture électrique permettent une réflexion sur le coût de développement et le coût de production

Avant la production réelle d’un voiture, actuelle ou ancienne, électrique ou non, le coût de développement est à prendre en compte. Evidemment, les études techniques sont plus poussées avec les technologies actuelles que celles tenues à l’époque de la 2cv. Il n’y a qu’à relire le cahier des charges de la 2cv*, simplissime et reposant sur le bon sens paysan pour se rendre compte qu’on ne perdait pas de temps en conjectures. Néanmoins, la 2cv devant répondre aux contraintes pratiques et économiques de l’utilisateur, sa conception, très réfléchie, reste un exemple de simplicité et de rusticité.

Rapportée à sa longévité de production, Citroën et par là-même ses utilisateurs ont fait une belle affaire !

Rapportée à un espérance de production plutôt réduite, le rapport coût de développement / coût d’exploitation est bien moins « rentable » aujourd’hui pour une voiture moderne que pour la 2cv ! Evidemment avec la société de consommation, il faut toujours aller plus vite, innover et présenter des produits toujours plus aboutis. La course à la technologie est ouverte mais très incohérente avec notre envie d’écologie…

Bien que la 2cv n’ait pas été vraiment conçue pour durer, celle-ci est revenue en force ces dernières années avec la mode du vintage et du retour à la simplicité ayant convaincu bo-bos et nostalgiques. Pour la première fois en 2009, en réponse à la crise économique et dans le but de stimuler l’industrie automobile, de nombreuses personnes ont profité de la prime à la casse en échange de leur voiture d’occasion et de leur 2cv jetée à la poubelle. Depuis, ce type de programme a été renouvelé et modifié à plusieurs reprises. Cela donne des regrets à certains mais la période actuelle n’est pas plus brillante. N’a-t-on a pas droit à une prime pour l’achat d’une voiture électrique en échange de quoi, dans un avenir proche, nous allons mettre au rebus nos voitures thermiques émettrices de C0² mais encore bonnes à rouler, en échange d’une voiture « propre » qui sort de la concession ?

* Le célèbre « 4 roues sous 1 parapluie » de Pierre-Jules Boulanger, ingénieur ayant dirigé Citroën, est à l’origine de la TPV (Toute Petite Voiture, dénomination du projet qui allait devenir la 2cv). Son  idée bien précise du cahier des charges de cette future automobile avait été énoncé comme suit :

« Faites étudier par vos services une voiture pouvant transporter deux cultivateurs en sabots, cinquante kilos de pommes de terre ou un tonnelet à une vitesse maximum de 60 km/h pour une consommation de trois litres d’essence aux cent.

En outre, ce véhicule doit pouvoir passer dans les plus mauvais chemins, il doit être suffisamment léger pour être manié sans problèmes par une conductrice débutante (nous passerons sur la misogynie de l’époque…). Son confort doit être irréprochable car les paniers d’œufs transportés à l’arrière doivent arriver intacts. Son prix devra être bien inférieur à celui de notre Traction Avant. Enfin, l’esthétique importe peu (!)».

Le coût de production des pièces qui composent un véhicule est aussi à prendre en compte, car émettrices elles aussi de CO².

Pour la 2cv, l’impact écologique de la production est ancienne car sa dernière sortie de chaîne date de 1990 (les 2cv d’Escapa’deuche ont de 35 à 50 ans) et donc largement « amortie ». La 2cv peut être restaurée à l’infini, que ce soit au niveau mécanique qu’au niveau de la structure ou de la carrosserie. Rustique, la 2cv a un besoin limité de pièces pour son entretien quotidien. Peu de plastique comparé à une voiture moderne et pas d’électronique (hormis l’allumage moderne que nous lui avons installé pour les avantages cités plus haut) sont les caractéristiques techniques de la 2cv. Enfin, une 2cv pèse 580 kg ce qui limite aussi son impact écologique. Sans s’attarder sur les grosses berlines, aujourd’hui, une voiture pèse en moyenne entre 1 et 1,5 tonne ! En 30 ans, la masse de nos voitures a augmenté de… 30% en moyenne pondérée en France. 

Pour Escapa’deuche, les voitures sont restaurées et ne sont donc pas neuves. L’impact écologique de nos 2cv n’existe aujourd’hui que sur les pièces neuves mais en circuit court car elles sont fabriquées et vendues à Cassis, à 200km de nos entrepôts. Ce, pour le remplacement des pièces d’usure tels que les freins ou l’embrayage et dans une moindre mesure l’habillage intérieur et les pièces de carrosserie qui ne sont pas souvent changées mais plutôt réparées.

Rappelons que la 2cv a été créée pour être une voiture simple de conception, d’utilisation et de réparation, sobre en consommation comme en entretien, donc économique. Un véhicule vert avant l’heure en somme !

3) Le remplacement des moteurs et batteries :

Concernant la voiture électrique, seul le moteur thermique et la batterie ont été remplacés par une motorisation et des batteries électriques, les pièces mécaniques et de carrosserie étant produites à l’identique des véhicules thermiques.

Il est intéressant de savoir que :

  • Les pièces des moteurs thermiques français sont fabriquées dans des usines de production réparties sur tout le territoire français (centres de production, d’assemblage et de fabrication de composants) a contrario du moteur électrique car les entreprises automobiles productrices sont essentiellement étrangères à la France et travaillent en collaboration avec des fournisseurs spécialisés dans la fabrication de composants électriques pour produire leurs moteurs. Tesla, Nissan, General Motors, BMW, Volkswagen, Hyundai, et bien autres encore, sont installés aux USA et en Chine. BMW et Volkswagen fabriquent une partie de leur moteur en Allemagne et Renault en France mais ne peuvent produire la totalité sur leur territoire national, les allemands faisant appel aussi à la collaboration chinoise et américaine tandis que le français travaille aussi avec ses usines situées en Espagne, au Maroc et au Brésil.
  • Les composants proviennent majoritairement de pays hors Europe :

            – L’Amérique du Sud et l’Afrique pour l’extraction des minerais pour les batteries

            – La Chine, principal producteur et exportateur de batteries dans le monde

            – Les Etats-Unis et l’Asie pour le recyclage des batteries.

A l’instar de la voiture thermique, l’impact écologique existe aussi pour la voiture électrique :

  • en terme de transport puisque les moteurs et les batteries viennent de loin
  • en terme environnemental et social si l’on doit regarder de plus près les conditions de travail pour l’extraction de minerai et son impact sur l’environnement et le recyclage des batteries, les batteries au lithium-ion nécessitant un processus de recyclage approprié pour gérer les matériaux chimiques et les émanations toxiques. On peut espérer un progrès, la France et l’Europe développant depuis peu des infrastructures de recyclage adaptées pour répondre à la croissance du nombre de voitures électriques sur le marché mais que dire des infâmes conditions d’extraction des minerais ?

4) L’espérance de vie :

Nous pouvons distinguer l’espérance de vie de production d’un modèle de l’espérance de vie du véhicule lui-même :

En général, la durée de vie de production d’une automobile moderne varie en moyenne entre 5 et 10 ans, avec certaines variations en fonction de différents facteurs tels que la marque, le modèle, les avancées technologiques, les réglementations en matière d’émissions, de sécurité et d’autres considérations économiques. Pendant cette période, les constructeurs automobiles peuvent apporter des mises à jour de design, de technologie et d’ingénierie pour maintenir la compétitivité de leurs modèles sur le marché. Cela peut inclure des mises à jour esthétiques, des améliorations de performance, des mises à niveau de sécurité et des ajouts de fonctionnalités.

En mode d’utilisation, la durée de vie moyenne d’une voiture à essence est d’environ 10 ans et 150 000 kilomètres et 250 000 pour un diesel.

Cette durée de production et cette durée de vie sont donc bien loin derrière celles de la 2cv car la 2cv détient l’un des records mondiaux de longévité avec ses 42 ans de production continue de 1948 à 1990 et il n’est pas rare de voir encore des 2cv rouler sur nos routes, tout du moins celles n’ayant pas succombé à la prime à la casse de 2009 !

5) Vers une conversion totale à l’électrique ?

Nos voitures thermiques actuelles, qui ne sont plus en odeur de sainteté, ne suivront pas le grand chemin de la longévité de la 2cv d’autant plus qu’elles verront leur vie écourtée malgré les efforts de réduction de pollution opérés ces dernières années. L’interdiction de la production des voitures thermiques interviendra en 2035.

Des questions s’en suivront :

  • Aura-t-on suffisamment d’énergie électrique pour alimenter tout le parc automobile français quand sa conversion globale à l’électrique sera effective ? Que dire au niveau mondial avec une population en constante croissance et d’autant plus dans des pays surpeuplés comme l’Inde ou la Chine ?
  • L’énergie nucléaire, choix de la France, avec 0 émissions de C0² est-elle écologique si l’on se penche sur le traitement des déchets de cette énergie dite « propre » ? Les générations futures trouveront-elles une alternative à l’enfouissement de ces déchets ? Il n’existe aucune solution pour leur élimination définitive ou pour contrer leur dangerosité alors qu’elle subsistera des centaines de milliers d’années.
  • Avec le manque d’eau de plus en plus marqué, comment sera géré le refroidissement des centrales nucléaires alors qu’elles auront à produire plus ?
  • En période caniculaire, comment seront gérées les recharges électriques ? L’exemple de la Californie qui a interdit à ses habitants de recharger leur véhicule pendant les fortes chaleurs pour ne pas surcharger le réseau électrique pose question.
  • Quel sera l’impact social sur les emplois ? La conversion des « anciens » du monde automobile spécialisés dans la motorisation thermique (emplois de la chaîne d’approvisionnement, de la fabrication et de la maintenance des véhicules) sera-telle si aisée alors que les compétences en matière de motorisation thermique devront devenir des compétences en technologies électriques, électroniques et informatiques ? Une question importante au vu de l’emploi : la fabrication d’une voiture électrique nécessite environ 40% de main-d’œuvre en moins qu’une voiture thermique.
  • Quel sera l’avenir des entreprises sous-traitantes des grands constructeurs automobiles qui fabriquent aujourd’hui les moteurs thermique et les boites de vitesse ?
  • Le changement des modes de déplacement des populations ne devrait-il pas être poser dans sa globalité ?
  • Aux heures antinomiques du recyclage et de la surconsommation, comment justifier auprès d’un population à bas revenus de changer leur voiture qui marche encore et qui répond encore aux normes antipollution ?

La voiture électrique pourra maximiser son impact environnemental positif si elle :

  • Favorise la production d’électricité à partir de sources renouvelables et/ou qui résout le problème de l’élimination des déchets nucléaires
  • Continue d’améliorer les technologies de fabrication et de recyclage de ses batteries d’autant qu’un recyclage optimum permettra de diminuer les risques d’approvisionnement et de déséquilibres sur le marché mais pas de combler la demande grandissante de métaux rares
  • Solutionne la problématique du transport des batteries et des pièces fabriquées hors Europe
  • Accompagne la conversion des employés du secteur automobile
  • Trouve une solution pour diminuer le poids des voitures, qui fait fluctuer fortement son empreinte carbone (les batteries dont nous avons largement parlé mais aussi les particules fines émises par les pneumatiques et les freins, les véhicules électriques étant plus lourds que les voitures thermiques ont une abrasion supérieure des pneumatiques et des plaquettes).  Si les progrès technologiques ont permis au moteur de moins consommer, l’augmentation de la masse des véhicules annule tous ces efforts.

Des enjeux complexes pour la voiture électrique mais aussi pour toute solution de déplacement individuelle motorisée dont aucune n’est vertueuse aujourd’hui !